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lundi 19 septembre 2011

Soutien à l'association Cauri

Survie Gironde participe activement au Collectif Girondin pour le Rwanda, au côté de l'association Cauri. Depuis plus de 15 ans, nous tentons d'informer sur le rôle de la France dans le génocide des Tutsi du Rwanda. Ce rôle, souvent contesté, se retrouve sous une facette judiciaire. En effet, plusieurs personnes accusées de crimes génocidaires par des tribunaux rwandais, résident en France (cf le documentaire "Génocide au Rwanda: des tueurs parmi nous ?", diffusé le 28 juin sur France 2).
L'une de ces personnes a décidé d'attaquer l'association Cauri ainsi que 3 personnes, pour atteinte à la présomption d'innocence.
L'association Survie Gironde sera présente le 27 septembre pour apporter tout son soutien à l'association Cauri.
 
Nous reproduisons ici l'article publié par Cauri sur son blog :
 
Le 27 septembre 2011 à 14 h se tiendra au palais de justice de Bordeaux, le procès intenté par le docteur Sosthène Munyemana pour « atteinte à la présomption d’innocence » contre l’association Cauri et trois membres du Collectif girondin pour le Rwanda.
Ce procès n’est pas un événement isolé. Il s’agit d’une nouvelle péripétie d’une « affaire » qui dure depuis plus de quinze ans. Plus généralement, ce procès est symptomatique du climat qui prévaut en France dès lors qu’il s’agit de juger des faits relevant du génocide des Tutsi du Rwanda. Nous constatons, en effet, que depuis 1995, une vingtaine de plaintes ont été déposées visant des personnes accusées d’avoir participé au génocide de 1994,  mais aucune n’a encore abouti à un procès. A l’inverse, ceux qui doivent se défendre devant les tribunaux, ce sont les rescapé/es, leurs proches et tous ceux qui s’opposent aux discours négationnistes disposant de relais politiques et médiatiques en France… 
Au delà de notre situation particulière, l’issue de ce procès est importante. En effet, concernant cette question du génocide des Tutsi du Rwanda en France, depuis quelques mois, voire quelques années, on assiste à une offensive médiatique et judiciaire de la part des milieux négationnistes. En effet, dans ces cercles, on craint que la normalisation diplomatique entre la France et le Rwanda ne se solde par quelques conséquences judiciaires. Ces personnes nous associent depuis 1994 à un hypothétique « parti de l’étranger », un « cabinet noir » —pour reprendre les propos de Péan — à la solde du régime de Kigali présidé par Paul Kagame. On essaie aussi de faire croire que puisque certains d’entre nous sont des rescapé/es, il s’agirait de « régler des comptes personnels » avec le Docteur Munyemana. Ces manœuvres de diversion nous donnent parfois la nausée mais elles ne doivent pas nous faire oublier l’essentiel de notre combat : la mémoire des victimes qui sont mortes parce qu’un projet génocidaire a été réalisé par des responsables du Hutu Power rwandais que les  plus hautes autorités civiles et militaires de notre pays n’ont pas arrêtés en 1994 dans leur folle entreprise mais qui, au contraire, ont été soutenus au-delà de l’imaginable.
Nous luttons contre la banalisation de ce génocide sous toutes ses formes, ce qui comporte des risques en France aujourd’hui  ; vous pouvez nous soutenir de différentes manières :
1°) en étant présent/e le jour de l’audience le mardi 27 septembre à 14 h au TGI de Bordeaux ;
2°) en contactant des personnalités et des organisations pour qu’elles nous adressent des messages de soutien demandant notre relaxe devant le tribunal le 27 septembre à Bordeaux
3°) en nous adressant un chèque de soutien à l’ordre de « Cauri » avec la mention « soutien procès »
4°) en signant (et en  faisant connaître) la pétition en ligne sur notre blog 
 
 

Franc CFA et Françafrique : après les billets, par ici la monnaie !

Ce lundi 19 septembre à Bercy, le ministre français des Finances préside la réunion des ministres des Finances et des gouverneurs des banques centrales de la zone Franc, en présence du ministre de la coopération Henri de Raincourt. Tout un symbole : en pleine crise de la dette et de la monnaie européenne, ceux qui prétendent que la Françafrique n’existe plus ne trouvent rien à redire au maintien d’un de ses principaux mécanismes institutionnels, le contrôle monétaire par le franc CFA.

La semaine dernière, les développements médiatiques autour des « révélations » de Robert Bourgi sont venus une fois de plus étayer les soupçons de corruption de nombreuses personnalités politiques françaises de premier plan, dont l’actuel Président de la République. Mais l’association Survie rappelle que la nébuleuse criminelle de la Françafrique ne se limite pas à des transferts de mallettes de billets, complétés depuis longtemps par des montages sophistiqués dans les paradis fiscaux. Celle-ci repose surtout sur des mécanismes institutionnels tels que le maintien du franc CFA, seul système monétaire colonial ayant survécu à la décolonisation. Les pays de la zone franc n’ont aucune marge de manœuvre en termes de politique monétaire : depuis plus de 50 ans, ces décisions-là nécessitent l’accord de l’ancien colonisateur.

Cette quinzaine de pays monétairement vassalisés sont tenus de déposer la moitié de leurs réserves de changes sur un compte d’opérations au Trésor public français, et le gouvernement français possède toujours la capacité statutaire de contrôler, par son droit de vote et de véto, toutes les instances des banques centrales (BCEAO en Afrique de l’Ouest [1] , BEAC en Afrique centrale et BCC pour les Comores). Il peut donc imposer les grandes orientations monétaires de ces pays, comme cela avait été le cas sous le gouvernement Balladur lors de la dévaluation de 1994, dont les économies africaines ne se sont jamais relevées.
Cette ingérence française est justifiée par l’assurance qu’elle prétend offrir aux marchés financiers, transposition sur le plan monétaire du dogme de la « stabilité politique » qui permet à la France de soutenir les pires despotes du continent, en sous-entendant que ce serait pire sinon...
Elle est aussi présentée comme la garantie d’une prétendue « bonne gouvernance » de ces institutions monétaires ; cela n’a pourtant jamais empêché les dictateurs de se servir dans la caisse, et un câble diplomatique révélé par Wikileaks (09YAOUNDE608) cite un responsable de la BEAC selon lequel l’argent détourné était en partie canalisé « vers les partis politiques français. [...] Des deux côtés, mais surtout à droite, spécialement Chirac et y compris Sarkozy ».

Alors que la crise budgétaire des Etats européens repose la question de la souveraineté monétaire face aux marchés financiers, pratiquement personne ne s’étonne que les pays de la zone franc n’aient jamais eu ce droit souverain face à l’ancienne puissance coloniale : il est pourtant urgent que la France se désengage du système du Franc CFA.
L’association Survie appelle donc celles et ceux qui s’offusquent des livraisons de mallettes de billets de Robert Bourgi à ne pas seulement demander une enquête sur ces faits, mais à exiger un véritable examen de la politique française en Afrique, sur ses volets occultes comme sur ses mécanismes institutionnels, sans hypocrisie ni tabou.


Contact : Stéphanie Dubois de Prisque, chargée de communication stephanie.duboisdeprisque(a)survie.org 01 44 61 03 25

[1] Selon l’économiste togolais Kako Nubukpo, l’autorité de la France a été récemment réaffirmée lors de la création du Comité de Politique Monétaire de la BCAO puisque « le représentant du Trésor Français y a une voix délibérative, alors que le Président de la Commission de l’UEMOA [Union Economique et Monétaire Ouest-Africaine] n’y détient qu’une voix consultative ! » (http://alternatives-economiques.fr/... )

L'édito de Billets d'Afrique et d'ailleurs (12 Septembre 2011)

Retrouvez ici chaque mois l'édito du mensuel publié par SURVIE :
Billets d'Afrique et d'ailleurs.
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La reconquête 

Drôle de saison 2011 pour l’Afrique, dans le style un pas en avant-deux pas en arrière. L’authentique émergence citoyenne en Tunisie et en Égypte a été éclipsée par les guerres de recolonisation en Côte-d’Ivoire et en Libye. On voudrait nous faire avaler l’ensemble dans un même emballage estampillé « Droits de l’homme » et « démocratie ».
Mais, si l’opinion française, tous partis politiques confondus, s’est laissée prendre à cet amalgame grossier, l’opinion africaine, quasi unanime mais inaudible, ne s’y est pas trompée. Elle qui a vu dans les interventions en Côte- d’Ivoire et en Libye une entreprise de reconquête impérialiste.
La puissance dominante, qu’on l’appelle France, ONU, États-Unis, OTAN, décide souverainement de ce qui relève des « Droits de l’homme » et de ce qui est appelé « démocratie ». Ainsi le grand démocrate Alassane Ouattara peut-il nommer aux plus hauts postes de l’armée ivoirienne des responsables de crime contre l’humanité, comme Martin Kouakou Fofié. Ce chef de guerre est accusé, entre autres atrocités, d’avoir, en juin 2004, lors d’un conflit au sein du mouvement rebelle, enfermé et laissé mourir dans un container cinquante personnes. Ce n’est pas cela, pas plus que la persistance des exécutions extrajudiciaires dans les dernières semaines en Côte-d’Ivoire [1] qui va troubler les agapes ducouple Sarkozy recevant dans leur villa du Cap Nègre le couple Ouattara, qui séjournent en France dans leur villa de Mougins. Ces liens personnels entre un président français et un satellite africain, cette confusion entre l’État et le privé, c’est précisément ce que le candidat Sarkozy avait condamné dans le néocolonialisme gaullien. Il fait pire puisque, dans ce passé censé révolu, c’est Foccart qui assumait cette collusion, et non de Gaulle à Colombey. Quant à la révolte libyenne, dirigée par des ministres de Kadhafi, elle a triomphé grâce aux bombardements et aux fournitures d’armes de certains pays de l’OTAN, la France en tête. Le président du conseil exécutif du CNT (Conseil national de transition), Mahmoud Jibril, qui présidait jusqu’en 2011 le bureau du développement économique national, est un partisan résolu de la privatisation et de la libéralisation de l’économie libyenne. Cette victoire s’accompagne d’un déchaînement d’humiliations, d’exactions, de lynchages et d’assassinats à l’encontre des populations noires vivant en Libye censées être pro-Kadhafi, en fait victimes du racisme des « combattants de la liberté ». On ne décomptera jamais, dans l’info-spectacle, les milliers de disparus dans la fuite éperdue de ces populations en Méditerranée et dans le désert, dégâts collatéraux qui ne pèsent pas lourd face à la récupération du contrôle sur le pétrole libyen.
Pour un tyran abattu, dans des conditions plus que contestables, combien de despotes protégés ? On ne demande pas à la France de faire progresser l’idéal démocratique en bombardant les résidences des présidents africains consacrés par la fraude mais on est en droit d’en attendre au moins un rappel des droits civils et politiques et une restriction des relations avec des potentats qui emprisonnent et tuent leurs opposants, répriment leur population et pillent leur pays.
C’est au contraire la complicité de la France qui va permettre à un parti qui détient le monopole des ressources publiques et a un président installé à perpétuité de se pérenniser le 9 octobre prochain au Cameroun. La France a fourni tout l’arsenal nécessaire à la répression afin de permettre aux multinationales d’exploiter toutes les ressources et tous les services du pays, tandis que la quasi totalité de la population vit dans la misère.
Cette nouvelle forme de colonie, c’est sûrement cela qu’on appelle « démocratie » puisque personne, dans la France politico-médiatique, n’y trouve matière à vertueuse indignation.

Odile Tobner

[1] communiqué de HRW, 5 août 2011

samedi 17 septembre 2011

Affaire Bourgi: derrière les malettes, le pillage de l'Afrique et le nauffrage de notre démocratie

Ce n’est certainement pas une soudaine bonne conscience qui vient de pousser Robert Bourgi à détailler au Journal du Dimanche comment il a transmis pendant des années d’importantes sommes d’argent liquide aux plus hautes autorités de l’État français et à une frange de la classe politique de droite. Quelles que soient les motivations réelles de ces « révélations », elles démontrent plus que jamais la nécessité d’un changement radical dans les relations franco-africaines et d’un assainissement du monde politique et de nos institutions.

L’association Survie lutte depuis plus de 25 ans contre le système françafricain, dont le financement occulte des partis politiques français n’est qu’une facette. Il s’accompagne du pillage des matières premières des pays africains, d’une position quasi monopolistique des entreprises hexagonales sur bien des marchés des anciennes colonies françaises et surtout du soutien à des régimes autoritaires par la diplomatie et les forces armées. La conséquence directe de cette politique est la paupérisation de populations entières qui ne bénéficient pas de l’exploitation des ressources naturelles de leurs pays et subissent depuis les indépendances le joug de régimes soutenus à bout de bras par une diplomatie française complice des détournements et des exactions. S’il restait des naïfs pour y croire, l’image d’Epinal de la France « amie » de l’Afrique qui distille de l’ « aide » au développement en prend une nouvelle fois sérieusement pour son grade.

L’arrivée au pouvoir de Nicolas Sarkozy va au-delà d’un discours de façade sur une prétendue « rupture avec la Françafrique ».



Le soutien aux putschistes mauritaniens, les félicitations à l’élection frauduleuse d’Ali Bongo, la complaisance passée envers le régime de Ben Ali, mais toujours d’actualité envers ceux de Blaise Compaoré au Burkina Faso, d’Idriss Déby au Tchad ou encore de Denis Sassou Nguesso au Congo Brazzaville et de Paul Biya au Cameroun sont autant de signes que si la forme a peut-être changé, l’essence demeure.



Sous Sarkozy, les interventions françaises au Tchad en 2008, dans le Sahel, et cette année en Côte d’Ivoire et en Libye marquent même un regain dans le volet militaire de la Françafrique.

Au regard de cette continuité, difficile de croire au désintéressement de l’actuel président français, quand tous ses prédécesseurs ont profité d’un système si lucratif. Celui-ci a bel et bien adoubé Robert Bourgi en toute connaissance de cause concernant les agissements occultes de ce fils spirituel de Jacques Foccart et a fait de lui une pièce importante de son réseau de contacts et de négociations parfois occultes avec les chefs d’Etat africains, Omar Bongo en tête, avec lequel Nicolas Sarkozy affichait une proximité confondante.


A l’heure où certains commentateurs, ceux là même qui parfois s’étonnaient que l’on parle encore de Françafrique, s’amuseraient presque de cette « course à la valise » presque aussi « folklorique » et croustillante que les diamants de Bokassa, il est utile de dépasser la cap de l’anecdote. Au-delà des mallettes et des millions d’euros évoqués dans cette affaire, il est utile de rappeler que l’Afrique est victime d’une prédation économique et financière particulièrement sophistiquée. Depuis l’affaire Elf, il est ainsi de notoriété publique que les paradis fiscaux offrent une opacité parfaite pour les transactions occultes. Sur ce plan aucun doute que l’Afrique est bien entrée dans l’Histoire et dans la mondialisation, pour ceux qui se sont permis d’en douter.

Il est également utile de rappeler que cette affaire illustre l’absence totale de contrôle de la politique de la France en Afrique, que ce soit par le Parlement, la société civile et autres contre-pouvoirs. Au-delà des mécanismes institutionnels défaillants il y a aussi le renoncement de beaucoup qui « savent » ou « devinent » et se taisent.

Toute la lumière doit aujourd’hui être faite, en particulier par la Justice, sur les faits mentionnés par Robert Bourgi, Michel de Bonnecorse et les autres acteurs françafricains qui s’affrontent aujourd’hui par déclarations et révélations interposées.

À l’aube de cette nouvelle campagne électorale, Survie réaffirme également la nécessité d’un examen complet de la relation franco-africaine qui pourrait être mené dans le cadre d’une commission d’enquête associant chercheurs, parlementaires, représentants de la société civile et africaines, témoins clés, etc. Contrairement aux travaux précédents, un tel audit devra poser toutes les questions qui fâchent, qu’il s’agisse du soutien aux dictateurs africains et aux contreparties obtenues, du financement occulte de la vie politique française, du rôle de l’armée française et de ses multiples ingérences, des multinationales, du franc CFA, etc.

Pour commencer, notre association appelle les médias et les candidat-e-s à la présidentielle à oser enfin mettre la Françafrique au cœur des débats. Comme d’autres « affaires » actuelles, l’actualité démontre une nouvelle fois qu’il s’agit bien d’un enjeu crucial pour la démocratie française et nos institutions.

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