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mardi 30 octobre 2012

La Suède et la Norvège jugeront des génocidaires... Et la France ?



Publié le 15 octobre 2012 (rédigé le 2 octobre 2012) par Alain Gauthier

Les deux pays scandinaves viennent d’annoncer qu’elles s’apprêtaient à juger des présumés génocidaires rwandais présents sur leur sol.
Après la Belgique, l’Allemagne et la Suisse, voici deux nouveaux pays européens qui prennent leurs responsabilités en déférant devant la justice des personnes soupçonnées d’avoir participé au génocide des Tutsi au Rwanda en 1994.
Cette décision courageuse souligne les lenteurs de la justice française qui, à ce jour, n’a encore jamais déféré devant une cour d’assise un seul des présumés génocidaires présents sur le sol français.
Les plaintes ne manquent pourtant pas.
Même si la création du « pôle d’enquêteurs spécialisés pour crimes contre l’humanité » au TGI de Paris a pu soulever quelques espoirs, les familles de rescapés attendent toujours.

D’aucuns avaient cru que l’arrivée d’un gouvernement de gauche en France et la nomination de Madame Taubira comme ministre de la justice pouvaient changer la donne. Le Collectif des parties civiles rwandaise (CPCR) avait attiré l’attention, dès sa nomination, de la nouvelle Garde des Sceaux, sur l’inertie de la justice française.

Malgré une relance, le ministère n’a toujours pas réagi. Christiane Taubira, s’était pourtant rendue au Rwanda pour exprimer son soutien aux victimes.
Dix-huit ans après, il est temps que les présumés génocidaires rwandais vivant en France soient jugés. La Norvège et la Suède nous montrent le chemin.


Vous venez de lire un article du mensuel Billets d'Afrique 217 - octobre 2012
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Au delà de cette lenteur judiciaire, signalons que l'émission "Rendez-vous avec X" (France Inter) du 13 octobre 2012 revient sur la complicité de la France dans le génocide des Tutsi du Rwanda en 1994.






L'édito de Billets d'Afrique et d'Ailleurs (Octobre 2012)

Retrouvez ici chaque mois l'édito du mensuel publié par SURVIE :
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Le sommet de la tartufferie



On ne peut que se féliciter que l’Organisation internationale de la francophonie ait choisi Kinshasa pour tenir son XIVe sommet, du 12 au 14 octobre 2012. On ne pouvait pas trouver un meilleur symbole de l’influence française que le martyre que vit la RDC.
Il n’est, pour se convaincre des bienfaits de la francophonie, que de comparer le sort de ce malheureux géant – le deuxième plus grand pays d’Afrique et le plus riche de la planète en ressources naturelles – à celui de l’anglophone Nigeria. Si la situation de cet autre géant africain est loin d’être idéale, elle est sans commune mesure avec l’enfer où est plongée la RDC, en proie à des affrontements armés qui ont déjà fait des millions de morts et où des provinces entières sont livrées à la violence des milices. 
Ce chaos n’est que le fruit des constants efforts accomplis, depuis l’assassinat de Lumumba, par les puissants « parrains » occidentaux, au sens maffieux du terme, de ce pays pour perpétuer sa mise en coupe réglée, en substituant au colonisateur belge des kleptocrates lo­caux. C’est la raison pour laquelle la France n’a jamais mégoté son soutien au sinistre Mobutu, n’hésitant pas à intervenir militairement en 1978 pour le maintenir au pouvoir.

Aujourd’hui comme hier, en RDC comme dans tous les pays d’Afrique francophone, il s’agit avant tout de « préserver les intérêts français », périphrase désignant pudiquement le pillage effréné des ressources africaines. Mais « cachez ce sang que je ne saurais voir » : le rôle de l’OIF est de dissimuler le cynisme meurtrier de la Françafrique sous le voile respectable de la francophonie.

Après avoir béni les élections truquées qui ont confirmé les dictatures gabonaise et camerounaise, l’OIF vient ainsi cautionner le coup de force de Joseph Kabila, reconduit à la tête de la RDC à la suite d’un véritable hold-up électoral, à un moment où ce régime dissimule de moins en moins sa nature criminelle : assassinats et disparitions frappent ceux qui dénoncent les abus du pouvoir ; le procès des assassins présumés du charismatique président de « La voix des sans-voix », Floribert Chebeya, a soigneusement étouffé toute possibilité de poursuivre les véritables coupables ; le chef du parti de la Démocratie chrétienne, Eugène Diomi Ndongala, a été enlevé par la police le 27 juin, alors qu’il s’apprêtait à lancer une plate-forme de 69 partis d’opposition – on craint qu’il n’ait été liquidé – ; la résidence d’Etienne Tshisekedi, leader de l’UDPS, principal parti de l’opposition, a été mise à sac le 29 août.

Voilà le régime que, faisant fi des suppliques de l’opposition congolaise, Hollande honore en se rendant à Kinshasa. Dans ce pays saigné à blanc, notre bonhomme va pouvoir pontifier sans vergogne sur la « communauté de principes et d’idéaux », que constitue selon lui la francophonie.

Pourtant, comme le rappelle le site d’information « le Congo indépendant », « pendant l’Eurofoot, le gouvernement français avait refusé d’envoyer une délégation officielle en Ukraine, protestant ainsi contre traitement infligé à Mme Loulia Timotchenko. Pourquoi une politique aussi flagrante de deux poids deux mesures ? » Ces Africains ne comprennent décidément rien : quelle meilleure preuve de la grandeur de la culture française que cette nouvelle incarnation de l’éternelle figure de Tartuffe ?

Odile Tobner


 

lundi 22 octobre 2012

Après le 17 octobre 1961, la France serait-elle prête à reconnaître la guerre du Cameroun ?

Nous reproduisons le communiqué des auteurs du livre Kamerun ! publié sur leur site avec leur autorisation.

Vous pouvez également ré-écouter l'émission "La marche de l'Histoire" (France Inter) qui avait invité Thomas Deltombe le 15 octobre 2012 pour parler de cette guerre cachée qu'a été la non-indépendance du Cameroun.


« Il ne viendrait à aucun responsable français l’idée de nier cette tragédie. » C’est ainsi que l’ambassadeur de France au Cameroun, Bruno Gain, commente notre livre Kamerun ! Une guerre cachée aux origines de la Françafrique (La Découverte, 2011) dans le quotidien camerounais Le Jour de ce 18 octobre. On est loin de l’aveuglement total d’un François Fillon qui, en visite à Yaoundé le 22 mai 2009, avait osé affirmer que «  tout cela c’est de la pure invention » (source).

Après la reconnaissance hier par François Hollande du massacre des Algériens du 17 octobre 1961, la France reconnaîtra-t-elle bientôt les crimes qu’elle a commis au cours de la guerre sanglante qu’elle a menée contre les nationalistes camerounais, avant et après l’indépendance de 1960 ?

On ne peut que se féliciter de cette prise de conscience, mais on devine aussi entre les lignes de sa déclaration (reproduite ci-dessous) une tentative inquiétante de dédouaner la France de ses responsabilités, à travers quatre souhaits de l’ambassadeur :
  • prétexter que « tout le travail de mémoire et de recherche sur cette période n’a pas encore été fait » pour remettre en question la réalité des faits. Comme tout fait historique, la guerre du Cameroun mérite de plus amples études, mais le déroulement de la guerre et les responsabilités de la France sont déjà largement documentées.
  • reporter toujours à un « plus tard » indéterminé la reconnaissance officielle des crimes perpétrés par la France et/ou sous son commandement au Cameroun (« Le moment viendra sans doute où cet indispensable travail mémoriel sera accompli »). Il a fallu 51 ans à la France pour admettre qu’elle a commis un massacre au cœur de Paris. Combien lui en faudra-t-elle pour reconnaître la guerre du Cameroun ?
  • renvoyer une part importante de la responsabilité du conflit sur « les Camerounais » – lesquels ? – pour mieux dédouaner les autorités françaises de leurs propres responsabilités (« Il y a en effet place pour un regard lucide et responsable sur une histoire qui est aussi une histoire partagée ; une histoire dont Français et Camerounais ont été les acteurs et les responsables et qui requiert une approche nuancée. »)
    - revenir au prétexte du fractionnement « ethnique » du Cameroun, usé jusqu’à la corde, pour appeler à la « prudence »… sans mentionner que les autorités coloniales et néocoloniales sont les premières à avoir suscité et exploité les divergences « tribales » (« L’évocation du maquis, du rôle de l’UPC, ou de la répression contre la communauté bamiléké m’incite aussi à observer qu’il faut éviter tout ce qui pourrait susciter un retour au tribalisme ou au clanisme. »)
La France doit reconnaître qu’elle a mené une petite guerre d’Algérie en Afrique centrale, passée largement inaperçue à l’époque et soigneusement masquée depuis. Une guerre qui a causé la mort de dizaines voire de centaines de milliers de Camerounais entre 1955 et 1971, et qui a permis d’installer le régime de terreur toujours en place aujourd’hui, incarné par Ahmadou Ahidjo (1958-1982) puis Paul Biya (1982 -…).

Bruno Gain affirme vouloir lever « beaucoup de tabous et de non-dits sur ces années noires » en favorisant la recherche historique et le travail de mémoire.
Nous le prenons au mot et l’appelons à œuvrer pour :
  • l’ouverture complète des archives françaises sur le sujet : trop de cartons d’archives sont encore interdits d’accès aux chercheurs
  • l’organisation d’un colloque d’historiens international consacré à la guerre du Cameroun
  • l’octroi d’aides aux jeunes chercheurs, notamment camerounais, qui travaillent aujourd’hui sur ce passé avec des moyens dérisoires.  

Extrait de l’interview de Bruno Gain dans Le Jour du 18 octobre 2012 :

Le Jour : Des chercheurs français et camerounais ont montré et démontré que les autorités françaises avaient mené une véritable guerre contre le mouvement nationaliste camerounais dans les années 1950-1960 pour maintenir le pays dans la sphère d’influence française même après l’indépendance du 1er janvier 1960.Quelle est la position officielle de la France sur ce conflit qui a fait plusieurs dizaines de milliers de morts ? Considère-t-elle toujours que cet épisode, pourtant très finement documenté aujourd’hui (comme par exemple dans le livre Kamerun ! paru en 2011 aux éditions La Découverte), soit de la « pure invention » ? Ne pensez-vous pas que la négation de cette guerre va se retourner contre la France, perçue dès lors comme arrogante et incapable de regarder son passé en face ? Ou pensez-vous, au contraire, comme le disait François Hollande à propos de la guerre d’Algérie, que l’oubli est «  forcément coupable  » et qu’il y a enfin « place pour un regard lucide, responsable, sur notre passé colonial et un élan confiant vers l’avenir » ?
Bruno Gain : La question que vous posez relève de l’Histoire. Il ne viendrait à aucun responsable français l’idée de nier cette tragédie. Mais j’incline à penser que tout le travail de mémoire et de recherche sur cette période n’a pas encore été fait. « Kamerun ! » est un ouvrage sérieux qui apporte certes un éclairage intéressant. Sans doute peut-il y en avoir d’autres. Nous ne pouvons qu’encourager les chercheurs et historiens français, mais aussi les Camerounais eux-mêmes, à se pencher sur ces années difficiles. Il y a en effet place pour un regard lucide et responsable sur une histoire qui est aussi une histoire partagée ; une histoire dont Français et Camerounais ont été les acteurs et les responsables et qui requiert une approche nuancée. Mais il y a encore beaucoup de tabous et de non-dits sur ces années noires. Le moment viendra sans doute où cet indispensable travail mémoriel sera accompli. L’évocation du maquis, du rôle de l’UPC, ou de la répression contre la communauté bamiléké m’incite aussi à observer qu’il faut éviter tout ce qui pourrait susciter un retour au tribalisme ou au clanisme. Les ethnies camerounaises sont comme les cellules d’un même corps. L’une ne peut pas vivre sans l’autre. C’est l’essence même de l’unité du Cameroun. Et je crois qu’il faut se garder de tout ce qui pourrait fragiliser l’esprit de tolérance si caractéristique de ce pays. Une haute personnalité camerounaise disait naguère qu’il fallait « lier la gerbe des originalités camerounaises pour en faire le noyau de la culture nationale ». C’est une formule à laquelle j’adhère pleinement. Il faut en permanence encourager ce vouloir vivre ensemble.




dimanche 14 octobre 2012

Biens mal acquis : le dernier caprice du fils Obiang

Mediapart PAR FABRICE ARFI - ARTICLE PUBLIÉ LE VENDREDI 12 OCTOBRE 2012

Toutes les personnes qui ont approché le dossier poussent le même soupir effaré : rien ne l’arrête. Teodoro Nguema Obiang (dit Teodorin), vice- président de Guinée-Équatoriale et fils du chef de l’État en exercice, visé en France par un mandat d’arrêt international dans l’affaire des “Biens mal acquis”, envisage d’acquérir pour 200 millions de dollars l’un des plus gros yachts de luxe au monde.

Il s’agit d’un bateau baptisé Al Salamah, propriété du prince Sultan ben Abdul Aziz, le ministre de la défense d’Arabie saoudite décédé l'an passé. Ses héritiers veulent à tout prix vendre le yacht, un mastodonte de 140 mètres de long, haut de cinq étages, hérissé d’une piste d’atterrissage pour hélicoptère et doté d’une salle de cinéma et d’un hôpital… Entre autres.

Al Salamah Ébruitée le 4 octobre par une indiscrétion de L’Express, l’affaire semble se préciser, même si la vente n'a pas été (encore) finalisée. D’après les éléments recueillis par Mediapart, une société commerciale a été créée le 23 juillet dernier en Guinée- Équatoriale pour se porter acquéreur du yacht convoité par Obiang junior (très friand en la matière). Elle se nomme Sociedad de transporte maritimo Guinea equatoriale, la Sotramar-GE, enregistrée sous le numéro 2 481 dans les registres officiels de Malabo, la capitale de Guinée-Équatoriale.

Fait intrigant: la Sotramar est déjà le nom d’une société de transport maritime parapublique guinéenne, créée en décembre 1971 et impliquée dans le commerce de la bauxite, le principal minerai permettant la production d’aluminium, dont les terres guinéennes sont très riches.

Des banques approchées ces dernières semaines ont refusé de rentrer dans le dossier tant Teodoro Obiang est devenu un personnage judiciairement infréquentable. De fait, de nombreuses questions se posent quant à l’origine réelle des fonds que le vice- président guinéen se dit prêt à débloquer pour assouvir ses désirs. D’où l’extrême prudence d'institutions bancaires qui ne souhaitent pas être embarquées dans une éventuelle opération de blanchiment.

La confusion entre la Sotramar de 2012 (société privée) et son homonyme de 1971 (société parapublique) n’est-elle d’ailleurs pas entretenue pour mélanger argent public et intérêts privés ? L’avocat français du fils Obiang, Me Emmanuel Marsigny, ne souhaite faire aucune déclaration sur ce dossier. Tout comme le secrétariat particulier parisien de la famille Sultan qui, joint par Mediapart, a fait savoir « qu’aucune espèce de commentaire ne sera fait là- dessus ».

Teodoro Obiang, aujourd’hui en charge du portefeuille ministériel de la défense après avoir détenu celui de l’agriculture, n’est pas connu de la justice française pour sa rigueur dans la gestion des deniers publics de son pays.

Personnage central de l’affaire dite des “Biens mal acquis”, Obiang junior est visé depuis le 12 juillet 2012 par un mandat d’arrêt émis par les juges Roger Le Loire et René Grouman, qui le soupçonnent de détournement de fonds publics, de blanchiment, d’abus de biens sociaux et d’abus de confiance. En clair, ils accusent le fils Obiang de piller les richesses de son pays pour se constituer en France et dans le monde un faramineux patrimoine.

Les magistrats ont déjà fait procéder à la saisie de quatorze voitures de luxe, ainsi qu’à celle de très nombreux meubles et objets d’art possédés par M. Obiang, logé à Paris dans un somptueux hôtel particulier de l’avenue Foch. Celui-ci a fait l’objet d’une spectaculaire perquisition en février dernier.

Plusieurs rapports de la police et de la cellule anti-blanchiment du ministère des finances Tracfin ont décrit ces dernières années dans le détail les extravagances financières du fils Obiang. Dans une note de synthèse du 6 novembre 2007, l’Office central pour la répression de la grande délinquance financière notait ainsi que Teodoro Nguema Obiang avait « fait notamment l’acquisition en France d’une quinzaine de véhicules pour un montant estimé de plus de 5,7 millions d’euros ».

Parmi les bolides commandés auprès d’un constructeur alsacien figurent trois Bugatti Veyron « d’un montant unitaire de plus de 1 milliond’euros ». L’achat de plusieurs voitures a été effectué par des virements provenant de la Somagui Forestal, une société forestière guinéenne dont le dirigeant était Teodoro Obiang, qui occupait parallèlement à l’époque le poste de ministre de l’agriculture et des forêts, avec une indemnité officielle de… 3 200 euros mensuels. « Les flux mis en exergue (…) sont susceptibles de traduire du blanchiment du produit d’un détournement de fonds publics », notait Tracfin dans un rapport.

Les diligences judiciaires françaises, très mal vues par le clan Obiang, ont singulièrement tendu les relations diplomatiques entre Paris et Malabo, où la réplique n’a pas tardé. En mai 2012, une enquête pour corruption a été ouverte en Guinée, visant directement le président de l’association anti- corruption Transparence International France, Daniel Lebègue, à l’origine avec d’autres ONG françaises de la procédure des “Biens mal acquis”.

« Le sentiment d’impuissance d'un régime à bout de course, face à la marche de la justice, conduit à la multiplication des écrans de fumée et des contre- feux », avait alors réagi l’avocat William Bourdon, président de l’association Sherpa, partie civile dans le dossier des “Biens mal acquis” aux côtés de Transparence International.

samedi 13 octobre 2012

Communiqué: Hollande à Kinshasa: Françafrique et langue de bois

Après quelques atermoiements et une déclaration supposée offensive sur l’absence de démocratie en RDC destinée à atténuer d’éventuelles critiques, François Hollande se rendra dimanche à Kinshasa pour participer au sommet de l’OIF. Avec pour enjeu, sous couvert de promotion de la langue française et des valeurs républicaines, l’affirmation de la domination économique, politique et militaire de la France vis à vis de ses « partenaires » africains.

En langue de bois, la langue la plus courante dans les enceintes diplomatiques, « dictateur » se dit « chef d’Etat élu au terme d’un scrutin entaché de quelques irrégularités », se compromettre avec des régimes corrompus et répressifs se défend par la volonté de « ne pas pratiquer la politique de la chaise vide ». « État en déliquescence et en proie à la violence » se dit « Etat fragile » ou, si l’on veut se montrer un peu plus offensif, « Etat où la situation de la démocratie et des droits de l’Homme est inacceptable ».

En acceptant de participer au sommet de l’Organisation Internationale de la Francophonie de Kinshasa, et donc de se rendre sur les terres de Joseph Kabila, l’un des pires dictateurs du continent, imposé par les armes, la répression des opposants et la violation des urnes (à l’exemple de la mascarade électorale de novembre 2011), le Président de la République semble cependant bien enterrer définitivement ses promesses d’en finir avec le système de la Françafrique. Ce ne sont pas sa petite déclaration sur l’état des droits de l’Homme en RDC et quelques aménagements cosmétiques affichés dans le programme du déplacement présidentiel (escales à Dakar, rencontre d’opposants congolais) qui atténueront le choc du symbole. Celui de voir une nouvelle fois un chef de l’Etat français s’afficher aux côtés d’un parterre de chefs d’Etat supposés unis par une langue en partage, quand le terreau commun d’un bon nombre d’entre eux est la corruption et l’oppression, dans le cadre d’un Sommet de l’organisation porte-étendard de l’influence française qu’est la Francophonie.

De simple agence de coopération culturelle et technique (ACCT), en 1970, l’Organisation internationale de la Francophonie s’est muée de sommet en sommet en enceinte politique, avec la nomination d’un secrétaire général, l’adoption d’une Charte et un élargissement constant à des pays comptant parfois très peu de locuteurs français mais qui voient un grand intérêt à intégrer l’amicale des chefs d’Etat francophones, espace de solidarité politique à défaut d’être un vrai outil d’échange culturel et linguistique.

Malgré l’adoption de textes sur la défense de la démocratie, à l’instar de la déclaration de Bamako de 2000, l’OIF a en effet servi tout au long de son existence à conforter des dictateurs en place, tenant ses sommets à Brazzaville ou à Ouagadougou, envoyant des délégations complaisantes « observer » certaines élections (160 missions sur une vingtaine d’années, dont bien peu ont nourri la chronique pour leur esprit critique, à l’exemple de la caution apportée en octobre 2011 à l’élection présidentielle au Cameroun) ou acceptant dans ses rangs des dictateurs anglophones isolés politiquement.

Parmi les volets moins connus de l’activité de l’OIF figure également la « prévention des conflits », consacrée par la déclaration de Saint-Boniface, adoptée par l’OIF en mai 2006. Présenté comme un secteur de plus en plus stratégique pour cette organisation lors d’un colloque de l’OIF en 2009 à l’IRIS, s’appuyant principalement sur des activités de formation, ce glissement militaire de la Francophonie fait surtout redouter un nouvel habillage multilatéral de l’interventionnisme militaire français, en supplément des cadres onusien, européen (Eufor) ou de dispositifs comme RECAMP.

Ce déplacement intervient dans un contexte d’accélération du positionnement de l’exécutif français sur le terrain des relations franco-africaines, avec pour point focal la crise au Mali, qui alimentera à n’en pas douter les échanges formels et informels entre la délégation française et les chefs d’Etat africains présents à Kinshasa. Il serait à cet égard intéressant de savoir si le Président de la République osera parler de « situation des droits de l’Homme inacceptable » dans un pays comme le Tchad, dont la France négocie le soutien militaire à une intervention au Mali.

François Hollande et son gouvernement auront donc réussi l’exploit de s’approprier en quelques mois seulement toutes les composantes diplomatiques, politiques, monétaires et militaires de la Françafrique. Le terrain économique avec la promotion des intérêts d’Areva auprès du président nigérien Issoufou, reçu 11 juin dernier. Le terrain politique et diplomatique, avec les déplacements de ministres français au Tchad et au Burkina Faso fin juillet et l’accueil à l’Elysée d’Ali Bongo, Alassane Ouattara et Blaise Compaoré en l’espace de deux mois. Le volet militaire, avec pour point d’orgue l’activisme français dans les couloirs de l’ONU à New York pour imposer une intervention militaire dans le Sahel pilotée par la France. Et bien sût le volet monétaire, avec la célébration à Paris des 40 ans du franc CFA le 5 octobre dernier.

Ne manquait plus qu’un sommet de l’OIF pour, le temps d’une petite photo de famille, d’un discours de circonstance sur les valeurs et les droits à défendre (il est toujours utile d’animer un peu les repas de famille) et de quelques échanges avec des associations et opposants, continuer d’apporter du crédit à une organisation supposée linguistique qui n’a toujours été qu’un outil d’influence.

En langue de bois diplomatique, il est certes plus convenable de dire « Francophonie » que « Françafrique ».

Fabrice Tarrit, président de l'association Survie

Vous pouvez également l'article de Rue89 sur ce sommet.

mercredi 10 octobre 2012

23 et 24 Octobre : L'exploitation du pétrole dans le delta du Niger

Le mardi 23 octobre à partir de 19h30, la librairie du Muguet et Survie Gironde organisent une soirée débat sur les terribles conditions humaines et environnementales de l'exploitation du pétrole dans le delta du Niger (cliquez ici pour en savoir plus).

La soirée aura lieu à l'Athénée Libertaire (plan ci dessous) et s'organisera autour de la diffusion d'un documentaire réalisé par Philippe Lespinasse pour l'émission Thalassa, suivie d'un débat en présence du réalisateur ainsi que de Xavier Montanyà, auteur du dernier Dossier Noir qui vient de paraitre, intitulé "L'or noir du Nigéria" (éditions Agone).
Entrée libre.

Le mercredi 24 octobre, Xavier Montanyà donnera une conférence à Sciences-Po Bordeaux, salle Erasme (Pessac, Tram ligne B, arrêt Montaigne-Montesquieu), de 13h15 à 14h30.



Athénée Libertaire, 7 rue du Muguet à Bordeaux